Avec une formation comme cadre de l’Education nationale française, avec une expérience de 18 ans dans de nombreux lycées et collèges de la Seine-Saint-Denis en Ile de France, cette jeune dame d’origine malienne possède plusieurs fonctions, qui lui donnent la carrure d’une « wonder-woman », engagée à faire de la Formation et l’Apprentissage, la clé pour le chômage de cette jeunesse africaine.
Dans cette interview accordée au site www.afriqueeconomie.net, Mme Konaté BOUNE Aminata, nous parle de ses différentes casquettes de citoyenne engagée pour le développement du continent africain ; confirme l’apport important de la diaspora dans l’économie africaine et nous donne son avis sur la crise malienne que subit son pays le Mali.
A.E: Présentez-vous à nos lecteurs
Je suis Madame Konaté BOUNE Aminata. Ma formation première est cadre de l’Education nationale française, avec une expérience de 18 ans dans de nombreux lycées et collèges de la Seine-Saint-Denis en Ile de France. Egalement, je suis « personne ressource » de la Diaspora malienne de France, et récipiendaire de l’Ordre national du Mali en tant que chevalier depuis 4 ans maintenant. Parmi les nombreux engagements que je porte, je suis la Fondatrice de la chaîne de salons de coiffure solidaire « La Beauté Engagée », structure de l’économie sociale et solidaire qui accompagne des personnes en insertion sociale et professionnelle depuis 12 ans, par la valorisation de l’image et l’estime de soi. Nous sommes, à ce jour, présents dans 7 villes de Seine-Saint-Denis, avec un Projet à moyen terme d’extension mobile. Je suis également Co-Présidente du Collège de l’Emergence des Nouveaux Entrepreneurs Agricoles (CENEAG) ; Association qui promeut une Agroécologie génératrice de revenus et respectueuse de l’environnement. Et pour finir je suis CEO du Cabinet K§K Consulting and Development basé à Bamako au Mali, avec un rayonnement Ouest- africain.
A.E: Quelle est en ce moment votre actualité ?
Avec CENEAG, nous sommes actuellement sur un Projet de création de centre de formation et d’apprentissage aux métiers de l’Agriculture CFAMA, dans la zone de Kita au Mali. 5 hectares nous ont été mis à disposition par les autorités locales et nous sommes dans la phase de levée des Fonds pour matérialiser le Projet. Cette structure d’apprentissage est destinée à former principalement les jeunes et les femmes. Concernant K§K Consulting, nous venons de boucler une série de participation à différents événements tel que le Forum du 1er emploi à Dakar, en février 2022 ; les African Leadership Awards à New York, en novembre 2022 ; le Forum International des Entreprises Francophones à Dakar (FIEF), en novembre 2022. Dans les prérogatives qui sont les nôtres, nous poursuivons notre accompagnement de conseil à destination de nos structures partenaires et clientes en Afrique de l’ouest et dans les outremers.
A.E: En tant que Femme entrepreneure, quelles sont les difficultés auxquelles vous êtes confrontées au quotidien ?
Sans surprise, je vous dirai que la polyvalence dévolue au statut de Femme, mère, active et engagée, nécessite une grande organisation et une coordination importante pour rester performante et épanouie.
Les difficultés liées au genre sont connues et suffisamment discutées pour que je fasse l’économie ici de les énumérer. Je préfère donc mettre en exergue cette note d’optimisme qui consiste à dire qu’être Femme et Entrepreneure est possible, c’est d’ailleurs le cas d’une majorité de Femmes africaines. Nous avons aujourd’hui des leviers d’accompagnement à améliorer mais qui ont le mérite d’exister. Il nous incombe donc de nous en saisir et de cesser de nous enfermer dans nos difficultés car les réussites demeurent plus nombreuses. Cependant, je ne méconnais pas les réalités d’inégalités de genre d’accès aux ressources et aux savoirs : ces difficultés sont réelles mais pas insurmontables. Chaque « révolution », éveil des mentalités s’accompagne de combats de vie, c’est celui de notre époque, pour une amélioration des conditions de vie. Ce combat est le nôtre mais pour y parvenir nous devons rassurer nos homologues masculins afin de le mener ensemble pour une réelle justice sociale et vers plus d’égalité, bénéfique pour les sociétés.
A.E: Quel est votre avis sur l’apport de la diaspora, dans l’économie des pays en Afrique ?
L’apport financier des diasporas africaines n’est plus à démontrer. Dans la majorité des pays, il est largement supérieur à l’aide publique au développement. Rappeler pour l’exemple du Mali que la majorité des infrastructures de la vie quotidienne, telles que des dispensaires, des écoles, des lieux de vie ont été intégralement financés par des diasporas courageuses et soucieuses de leurs familles restées au pays, n’est que leur rendre justice. Mais je souhaiterais ici mettre l’accent sur le transfert de compétences auquel participent et contribuent pleinement les diasporas. Ces compétences vives, constituent de véritables leviers de développement à condition de mettre l’accent sur la formation de la jeunesse avec un volet particulier pour l’apprentissage. L’investissement des diasporas se traduit aussi par l’Entreprenariat et la Création d’emploi réel et durable, souvent sur Fonds propres avec toutes les difficultés que cela comporte. Par ces investissements concrets, elles concourent à renforcer le Secteur Privé, qui se doit d’être fort face à des États souvent défaillants, afin de relever les nombreux défis dont celui du développement de tout un continent.
A.E: Pouvez-vous nous parler du Cluster Digital Africa (CDA), dans lequel vous occupez une place importante ?
J’ai en effet l’honneur d’être l’une des Vice-Présidentes de cette ingénieuse structure qui a été créée par le talentueux Amadou DIAWARA qui n’est plus à présenter. Le Cluster Digital Africa (CDA) est un lieu de réseautage qui n’a pas son équivalent ; toutes les compétences y sont représentées et les personnes qui l’animent le font bénévolement avec pour unique objectif de contribuer à l’amélioration des conditions de vie des africains par les africains eux-mêmes, ou toute personne adhérant à nos valeurs internes. Il a pris son essor lors de la COVID 19, avec la mise à disposition gratuite de sa Plateforme de visio-conférence en ligne 100 % africaine et malienne, que je nomme ici : CDA-VISIO, une Plateforme d’intelligence collective et de co-construction. De nombreuses Commissions animent la structure et dispensent des Conférences de qualité en fonction de l’expertise des animateurs. J’invite d’ailleurs vos lecteurs à nous rejoindre: https://clusterdigitalafrica.com/
A.E: Le chômage de la jeunesse africaine est très parlant. Quels sont vos solutions ?
La citoyenne engagée et concernée que j’aime à me définir tente d’impacter concrètement par un réel plaidoyer auprès de nos autorités africaines, sur la nécessité d’investir massivement sur la Formation et l’Apprentissage, parallèlement à l’Education. Le transfert de compétences évoqué plus haut concoure à lutter contre ce chômage de masse. Notre Projet de Centre de formation et d’Apprentissage aux métiers de l’Agriculture y contribue également. Les emplois directs que nous créons sur place sont aussi une partie de la réponse. Et, pour finir, l’Université Virtuelle du Mali créée par Amadou DIAWARA et mise à la disposition du CDA constitue également une partie de la solution. L’État seul ne peut pas tout. ; cela dit, la vision stratégique et la volonté politique lui incombent.
A.E: Quels sont vos Projets à court et moyen termes ?
Nous sommes concentrés sur la matérialisation du CFAMA à Kita au Mali, afin d’apporter une réponse concrète à la question de l’employabilité de la jeunesse et à l’exode mortifère de cette force vive en mer. Nous nous évertuons à répondre positivement aux sollicitations de nos clients afin d’élargir notre zone de chalandise. Nous maintenons notre plaidoyer et nos actions en faveur d’un leadership féminin au service de l’émancipation des Femmes par l’économie en Afrique.
A.E: Le Mali, votre pays d’origine, est confronté à une crise, quelle est votre analyse et qu’est-ce que vous souhaitez ?
Le Mali est à la croisée des chemins et comme de nombreux grands pays dans l’histoire, le Mali traverse une crise sans précédent liée à l’affirmation de sa souveraineté pleine et entière. Un combat facile ne serait pas un combat ! Les défis sont nombreux, mais nous demeurons optimistes et déterminés à atteindre l’objectif de développement nécessaire à un mieux-être dans nos pays respectifs. En soldate du développement et en citoyenne consciente, concernée et engagée, je joue modestement ma partition à l’édifice du renouveau malien pour une souveraineté territoriale, alimentaire et économique.
A.E: Votre mot de fin à nos lecteurs
Merci à votre média en ligne Afrique Économie, de nous avoir donné cette tribune pour faire connaître nos engagements et nos actions. Pour cette nouvelle année, je souhaite à l’humanité et particulièrement à l’Afrique qui a traversé de nombreuses zones de turbulences, de retrouver la paix ; car sans paix durable, il ne saurait y avoir de développement endogène, ni de futur économique et social possible. Je ne saurai terminer sans un mot pour mes sœurs dans un souci de sororité : Endossons réellement notre rôle de sentinelle de paix et de développement et imposons-nous par notre talent et non par notre genre. N’hésitez pas à me joindre sur www.aminatakb.com. Bonne année 2023.
Nadège Koffi