Philippe LACÔTE est né et a grandi à Abidjan en Côte d’Ivoire (Afrique de l’Ouest). Après un passage au Lycée classique d’Abidjan, il fait ses études en Europe et obtient une Maîtrise de Linguistique à l’Université Toulouse II-Le Mirail. De Reporter à Chroniqueur sur des Radios, M. LACÔTE se tourne vers une passion, le cinéma et commence comme Projectionniste au cinéma « Le Cratère ». Il occupera le rôle d’Assistant à la Programmation sous la direction de Michel DEDEBAT. Durant cette période, il initie un cycle de cinéma fantastique qui va devenir le rendez-vous des jeunes cinéphiles toulousains. C’est au sein de ce Groupe que se constitue l’équipe de son premier court-métrage « Somnambule », tourné en 16 mm noir et blanc.
C’est la série d’expériences, de Prix, de Distinctions qui est lancée dans la carrière professionnelle du Réalisateur-Producteur-Scénariste ivoirien et qui nous fait entrer en contact par cette interview accordée au site www.afriqueeconomie.net afin de nous parler de l’univers du Cinéma en général, mais surtout des réalités de la Côte d’Ivoire ; de son expérience générale ; de son actualité et des propositions à rehausser l’image du Cinéma ivoirien.
A.E : Pouvez-vous vous présenter à nos lecteurs svp ?
Je suis Philippe LACÔTE, Réalisateur et Producteur ivoirien ; je suis également Scénariste. J’ai représenté plusieurs fois la Côte d’Ivoire dans des festivals majeurs de cinéma comme Cannes, Venise, Toronto. Et j’ai eu l’honneur de représenter la Côte d’Ivoire aux Oscars 2020. J’ai grandi à Abidjan, à côté du cinéma « Le Magic » à Marcory.
A.E : Quel a été votre cursus scolaire et universitaire, ainsi que votre formation professionnelle ?
J’ai fait mes études secondaires au Lycée Classique d’Abidjan ; ensuite, je suis parti pour la France, où j’ai étudié la Linguistique. En parallèle, j’ai commencé à faire de la radio en tant que Reporter et Chroniqueur ; et puis le Cinéma. Je n’ai pas fait d’école de Cinéma, mais différents métiers à l’intérieur du Cinéma, tels que Projectionniste, Assistant de Production.
A.E : Qu’est-ce qui vous motive à vous pencher dans le domaine du Cinéma ?
C’est une véritable passion, je n’imagine pas ma vie autrement ; le Cinéma a toujours été présent dans ma vie. Enfant, ma maison était presque collée à un cinéma, et j’ai passé ma vie dans les cinémas ; c’est un Art fascinant par sa force à capter la réalité mais aussi à créer du magique.
A.E : A ce jour, combien de Films et de Prix à votre actif ?
Je n’ai pas compté exactement ; j’ai quatre courts métrages, trois documentaires, deux long métrages de fictions, des mises en texte de journaux de cinéastes. J’ai beaucoup travaillé avec ma collaboratrice Delphine JAQUET. Nous avons co-réalisé avant de faire nos films séparément mais de continuer à collaborer. Pour mon dernier film « La Nuit des Rois », on est à une vingtaine de prix dont cinq aux Etats-Unis.
A.E : Quelle est votre actualité ?
Je produis une série internationale sur le Coupé-Décalé, qui s’appelle « CLASH » et qui se déroule entre Kinshasa et Abidjan ; c’est une série musicale, qui raconte par la fiction, des rivalités dans le monde du coupé-décalé. Et sinon, je viens d’annoncer au dernier Festival de Cannes, mon prochain long métrage, « Les 7 voleurs d’or », qui va se tourner en 2024 entre l’Afrique de l’Ouest et New York. Je travaille aussi sur plusieurs Projets hollywoodiens en tant que Scénariste.
A.E : Quelles sont les difficultés que vous rencontrez depuis que vous exercez ce domaine ?
Cela fait plus de 20 ans que je pratique ce métier ; j’ai toujours cherché à être indépendant donc j’ai monté des structures (une en France et une en Côte d’Ivoire) pour produire mes Films. ; ce n’est pas forcément le chemin le plus court. Je dirais que le plus dur a été de faire passer mon univers ; au début, presque tout le monde me disait que mes scénarios étaient mal écrits car ils contenaient trop d’histoires dans la même histoire ; aujourd’hui, c’est devenu mon identité en tant que réalisateur !
A.E : Pensez-vous que les Dirigeants de nos pays africains appuient de façon concrète les Acteurs de ce secteur d’activité ?
Il y a eu ces dernières années des avancées, notamment par la mise en place de Fonds nationaux de soutien au cinéma. En Côte d’Ivoire, au Sénégal, au Ghana, etc ; c’est une bonne chose ; mais il faut maintenant que l’Etat définisse mieux le cadre et impulse la formation des jeunes ; le cinéma et l’audiovisuel est un domaine qui peut créer des emplois ; et c’est la carte de visite d’un pays.
A.E : La Côte d’Ivoire est la plaque tournante de la Culture en Afrique. Pourquoi le volet cinématographique peine à se positionner comme celui du Nigéria et même du Burkina Faso, où le cinéma est appuyé par le Gouvernement ?
La plaque tournante de la culture en Afrique francophone ? Même ça, c’est discutable. Le Nigéria a développé un vrai système économique avec Nollywood ; mais ce système est difficilement applicable en Côte d’Ivoire. Nous devons trouver notre propre économie au sein de l’Industrie Cinématographique et Audiovisuelle, les choses bougent dans ce sens, avec la nouvelle Ministre de la culture Françoise REMARCK, qui connaît bien les enjeux du domaine. Au Burkina, Faso il y avait une réelle impulsion autour du FESPACO ; mais il me semble que ce n’est plus le cas.
A.E : Quels sont vos Projets à court et moyen termes ?
Mes Projets comme je l’ai dit, c’est de mettre en place la série « Clash », et de montrer à travers cette série, qu’il est possible de produire des standards internationaux depuis le continent africain, en direction de tous les publics. A moyen terme, mon objectif est de contribuer à l’émergence d’une industrie cinématographique en Côte d’Ivoire.
A.E : Quels sont les propositions que vous pouvez faire afin de rehausser le cinéma ivoirien au niveau International ?
J’ai la chance d’avoir une expérience au niveau international ; il faut que nos scénaristes travaillent sur des histoires très ancrées dans notre culture et en même temps avec une portée universelle. Cela ne sert à rien de faire des films d’action à la manière de Hollywood, avec un budget 100 fois inférieur. Sur ce terrain, on est battus d’avance ; il faut accompagner les Producteurs à tous les stades du Projet.
A.E : Que pensez-vous du système cinématographique en Côte d’Ivoire ?
Le système cinématographique gagnerait à faire la distinction entre long métrages de cinéma, série TV et films documentaires ; ce n’est pas la même réalité.
A.E : Votre mot de fin à nos lecteurs
On ne pourra pas faire de la Côte d’Ivoire une terre de cinéma, sans la participation et le soutien des spectateurs, c’est-à-dire de la population ; il faut aller voir nos films quand ils sont à l’écran, il faut éviter de regarder nos films illégalement car en le faisant, vous empêcher le cinéma de votre pays d’exister ; chacun doit prendre ses responsabilités.
Interview réalisée par Nadège Koffi