Lauréat de la CGECI ACADEMY 2016, M. Beni N’Gouan KOUAME, aujourd’hui Directeur Général de la Société Ivoirienne de Transformation du Vivrier (SITRAV), une jeune structure ivoirienne qui a démarré ses activités en juin 2016, envisage l’expansion de la transformation de nos produits vivriers, qui sont forts bien utilisés dans la cuisine de nombreux ménages en Afrique.
Avec un DESS en Management de la qualité, M. KOUAME s’est plus porté sur les produits du piment et du poivre, qu’il transforme dans sa petite unité de transformation. Cette start-up qu’il gère conjointement avec son épouse, fait aujourd’hui un Chiffre d’Affaires d’environ 5 millions de FCFA par mois qui auparavant faisait un Chiffre d’Affaires de 300.000 FCFA par mois.
Dans cette interview accordée à www.afriqueeconomie.net dans les locaux de sa structure située à Abidjan (Afrique de l’Ouest), plus précisément à Yopougon quartier ananeraie, il parle de ses débuts, de l’objectif qu’il avait d’apporter de la valeur ajoutée à son Projet et surtout exhorte la jeunesse africaine à s’intéresser à la production et la commercialisation du piment, qui dit-il est un produit rentable.
A.E : Depuis quand avez-vous lancé votre structure ?
Officiellement on a lancé notre structure en 2016, le 2 juin 2016. Mais officieusement c’est depuis 2013.
A.E : Combien d’employés avez-vous à votre actif à ce jour ?
Actuellement nous avons au niveau de la production quatre personnes et au niveau de la distribution, nous avons sept personnes.
A.E : Avez-vous eu du financement pour lancer votre entreprise ?
Non, nous n’avons pas eu de financement dès le départ. Nous avons commencé nous-même et c’est après que nous avons remporté le Prix CGECI ACADEMY 2016, qui nous a permis d’avoir un peu d’argent pour acheter notre matériel.
A.E : Pourquoi avoir fait le choix de la transformation du piment et du poivre, parmi tant de produits vivriers sur le territoire national et même sur le continent africain?
Il faut dire que c’est depuis l’université que j’ai eu cette idée. J’ai vu que la plupart des produits vivriers périssent dans les champs, alors qu’en certaine période on a vraiment besoin de cela. Et les grosses sociétés s’intéressent plus aux produits tels que le Café, le Cacao or il n’y a aucune structure qui ne s’intéresse à la transformation du vivrier. Notre objectif d’abord était d’apporter notre petite contribution sur la conservation des produits vivriers. Mais lorsque nous avons fait notre étude de marché, au fait nous devrions commencer par l’aubergine, parce ce que nous avons vu que quand nos mamans écrasent l’aubergine, cela les épuisent. Et au fur à mesure qu’on écrase, l’aubergine, il y a le caillou qu’on prend pour écraser l’aubergine qui se mélange dans la pâte obtenue et l’on consomme indirectement sans s’en rendre compte. Notre objectif était de transformer d’abord l’aubergine, ainsi par la suite les autres produits vivriers. Mais, la transformation de l’aubergine nécessite vraiment de grands moyens, c’est pour cela que nous avons commencé par le piment. Mais, notre objectif est de transformer tous les produits vivriers qui sont utilisés par les femmes dans la cuisine.
A.E : Quels sont à ce jour les produits dont disposent la SITRAV ?
Actuellement nous avons trois produits. Il y a le piment en poudre, il y a le poivre en poudre et le poivre africain que nous appelons communément « Fèfè ». Tous ces produits ont pour nom de marque MAKO 100% bio, qui signifie en langue locale (agni) piment.
A.E : Où sont commercialisés vos produits ? Et à combien sont-ils vendus ?
Nos produits sont commercialisés en tout cas, en grande partie, dans les boutiques de quartiers. Les boutiques de mauritaniens, les sénégalais, les petites boutiques que vous pouvez trouver dans tous les quartiers de la capitale abidjanaise. Ils ne coûtent que 25 francs CFA l’unité.
A.E : Expliquez-nous le processus pour la transformation de vos produits ?
Le process, c’est d’abord d’acheter le piment, on le sèche, ensuite on le broie et on l’attache, après on fait les paquets et nous le commercialisons. Je précise que nos produits sont achetés avec les producteurs de piment et de poivre, mais c’est les producteurs eux-mêmes qui convoient le produit à l’usine et nous, nous achetons avec eux pour la transformation.
A.E : Ce domaine d’activité est-il rentable ? Si oui, que pouvez-vous conseillez à la personne qui veut se lancer dans ce secteur ?
Ce domaine d’activité est très rentable. Des fois, on a l’argent, mais on ne gagne pas de clients. Donc en tout cas, en ce moment nous sommes en train de chercher à tisser des partenariats un peu partout, pour sensibiliser les gens à planter le piment. Le piment est vraiment un domaine très rentable car tout le monde en consomme. Les gens plantent plus les produits d’exportations en Côte d’Ivoire, il faudrait planter plus les produits dont les gens en ont besoin et ce sont les produits vivriers. Et dans tous les ménages, les gens ont besoin de piments, donc si quelqu’un veut vraiment planter le piment, il va gagner de l’argent.
A.E : Quels sont les difficultés rencontrées au cours de votre parcours ?
Les difficultés que nous avons rencontrées au cours de notre parcours étaient de faire accepter le produit dans les boutiques parce ce qu’en Côte d’Ivoire, tout ce que les gens savent, c’est que le piment est vendu au marché, par les femmes. Donc aller proposer du piment à un boutiquier pour qu’il le commercialise dans sa boutique, c’est comme l’injurier. Mais, à force de les convaincre à y vendre, ils ont compris qu’on peut vendre du piment en boutique.
A.E : Quelle est votre politique Marketing et de Communication pour faire connaître les produits MAKO ?
Comme pour l’heure, on n’a pas assez de moyens, on est passé par du porte à porte. Ce qui fait que le produit marche plus dans les quartiers populaires, où on a accès à la population. On rentre dans les quartiers, dans les ménages et on présente le produit, on le fait déguster et ceux qui sont intéressés par le produit, on les invite à rechercher le produit à la boutique. Des fois, le boutiquier refuse de commercialiser mais à cause de la demande des populations qui souhaitent acheter le produit pour la consommation, il (le boutiquier) est obligé de passer la commande pour la distribution des produits MAKO 100% bio. C’est comme cela que nous avons commencé et maintenant on a fait des affiches que nous avons mis à la disposition des boutiquiers. Et lorsque nous avons eu le Prix CGECI Academy, il y a la Radiotélévision Ivoirienne (RTI) qui nous a donné une lucarne pour passer sur les antennes de la chaîne nationale ivoirienne pour faire notre publicité.
A.E : Avez-vous eu des Prix remportés à part le Prix de la CGECI ACADEMY 2016 ? Si oui, lesquels ?
On a eu d’autres prix mais il n’y avait pas d’accompagnement financier. C’est la CGECI ACADEMY qui nous a permis d’obtenir un financement.
A.E : Avez-vous des partenaires qui vous accompagnent à internationaliser vos produits ? Si oui, lesquels ?
Pour le moment, nous n’avons pas encore de partenaires pour internationaliser nos produits.
A.E : Comment trouvez-vous l’environnement des affaires en Côte d’Ivoire ?
Il faut dire que ce n’est pas facile, d’entreprendre en Côte d’Ivoire. Il faut être vraiment décidé à entreprendre pour pouvoir réussir en Côte d’Ivoire. Actuellement, je crois que le temps est favorable parce ce que les Institutions veulent aider. Mais comment trouver la bonne porte ? Où se trouve le financement ? Et des fois, quand il y a le financement, comment trouver l’information. Ce n’est pas facile d’avoir l’information et quand tu as l’information, des fois on demande beaucoup de documents qui ne sont pas facile à obtenir pour la personne qui est un débutant dans l’entrepreneuriat.
A.E : Quels sont vos projets à court, moyen et long termes ?
A court terme c’est de conquérir toute la Côte d’Ivoire. Notre objectif est de faire en sorte qu’à tout moment, et à m’importe quelle heure, on puisse trouver du piment sur l’ensemble du territoire national. C’est le travail que nous sommes en train de faire. Notre objectif est de pouvoir commercialiser dans tous les espaces. Que cela soit dans les supermarchés, supérettes, grandes surfaces, les campements les plus reculés du pays. A moyen terme, c’est de créer des champs et aussi aider les producteurs qui sont la plupart des femmes, qui n’ont pas de grands moyens. Les organiser pour qu’elles puissent produire et acheter ses produits afin qu’elles puissent vivre également de ce métier. Et à long terme, c’est de construire notre unité de transformation avec tous les standards internationaux qu’il faut. Avec la grâce de Dieu, nous avons décidé de partir et nous y allons y arriver.
A.E : Que souhaitez-vous de nos Gouvernants pour les personnes qui se lancent dans l’entrepreneuriat ?
Il faudrait de l’accompagnement. L’accompagnement n’est pas forcément financier. Mais que les structures étatiques se rapprochent des personnes qui apportent de la valeur ajoutée aux produits nationaux et qui apportent leur contribution au développement d’un pays. Que les structures étatiques sortent, se rapprochent, fassent des recherches pour voir que beaucoup de jeunes entrepreneurs ont besoin d’aide.
A.E : Un conseil à nos jeunes qui souhaitent se lancer dans l’entrepreneuriat ?
Il n’y a rien de telle que d’entreprendre parce ce que c’est facile de travailler pour quelqu’un. Quand tu travailles pour quelqu’un, cela te nourrit pour un temps mais quand tu vas à la retraite, tu deviens comme un enfant. Alors pendant que tu as la force, pendant que tu as la santé, que tu peux travailler, il est bon de penser à développer toi-même ton activité afin que tu grandisses avec cette activité, tu évolues avec cette activité, de sorte que quand la force va te manquer, cette activité va continuer à grandir et c’est en cela que tu auras le succès.
A.E : Votre mot de fin
Je tenais à remercier www.afriqueeconomie.net qui nous donne cette opportunité pour que nous puissions faire connaître cette activité, parce ce qu’il y a beaucoup de personnes qui sont en Côte d’Ivoire et même sur le continent africain qui ne savent pas qu’il y a des structures comme la nôtre (SITRAV), qui se sont lancés dans la transformation et la commercialisation de nos produits vivriers et envisagent de l’internationaliser. Nous remercions également la Confédération Générale des Entreprises de Côte d’Ivoire (CGECI) qui nous a été utile. Leur contribution nous a été très utile dans l’obtention de notre matériel de transformation (une deuxième machine), également avec la formation dont nous bénéficions jusqu’à ce jour. Nous disons également merci à tous ceux qui nous apportent leurs idées et contributions, pas forcément financier qui nous permettent d’atteindre notre objectif qui est d’apporter notre contribution au développement de notre pays (Côte d’Ivoire).
Interview réalisée par Nadège Koffi